Des chambres plus grandes, climatisées. Des aires communes invitantes. Des menus appétissants. Des soins mieux adaptés.
Il n’y a pas à dire, les maisons des aînés, dont la
ministre Marguerite Blais a annoncé la création mardi, promettent
d’être le nec plus ultra des centres d’hébergement pour personnes âgées.
Mais à quel prix ?
Mme Blais
a annoncé qu’un budget de 2,6 milliards a été prévu pour la
construction ou la rénovation de 5100 unités. La moitié de celles-là
seront de nouvelles places dans une quarantaine de centres d’hébergement
et de soins de longue durée (CHSLD) version 2.0, soit les nouvelles
maisons des aînés et les maisons alternatives destinées aux moins de
65 ans. Selon la ministre, elles seront prêtes avant 2022.
L’autre
moitié se trouvent dans 25 CHSLD vétustes qui seront remis à niveau.
Les soins qui y seront prodigués ressembleront à ceux fournis dans les
maisons des aînés, promet la ministre. Pour cette partie des travaux, il
n’y a pas encore d’échéancier.
Avec
ces chiffres en main, ça ne prend pas la tête à Papineau pour faire le
calcul. Le coût de construction pour chaque place atteindra 500 000 $,
un chiffre confirmé par le bureau de la ministre. Ouch !
C’est 40 % plus cher que les plus récentes unités
en CHSLD construites dans la province. L’écart avec le privé est encore
plus grand. Il est difficile de faire une comparaison exacte, puisque
les résidences privées s’adressent à une autre clientèle, mais si on
décortique deux annonces de projets récents à Gatineau et à
Victoriaville de Sélection Retraite, la construction neuve revient à
environ 200 000 $ par unité.
Les
nouvelles places annoncées par la ministre répondent à la majeure
partie des besoins immédiats. Il manque actuellement un peu plus de
3000 places dans les CHSLD de la province pour accueillir les personnes
qui ont besoin des services et des soins qui y sont fournis.
Cependant,
ce chiffre n’est que la pointe d’un iceberg qui s’approche des rives du
Saint-Laurent à grande vitesse : le vieillissement de la population.
Une étude de l’Université Laval conclut que si le Québec conserve son
modèle actuel de soins pour les personnes âgées, la province devra créer
3040 places de plus par année pour les 40 prochaines années. Au coût
proposé actuellement, on parle d’une dépense de 60,8 milliards sur
40 ans. Une fortune, en d’autres termes.
La
ministre Blais, qui a mis tout son cœur dans l’élaboration du projet
annoncé mardi, dit vouloir faire des maisons des aînés la nouvelle norme
de la province.
Or,
en regardant les coûts associés, on se demande si le gouvernement
auquel elle appartient vient de découvrir que le Québec est assis sur
des gisements pétroliers équivalents à ceux de la Norvège.
Sinon,
il faut alors se demander si le beau projet annoncé par la ministre
Blais n’aura pas une portée limitée se limitant à la réalisation d’une
promesse électorale.
À court terme, le projet semble enthousiasmant,
mais à long terme, la création de ces nouvelles maisons des aînés risque
de devenir un casse-tête pour le gouvernement comme le sont les centres
de la petite enfance (CPE) en ce moment, pour lesquels il y a plus de
demandes que d’offres. Qui seront les quelque 2600 heureux élus qui
auront accès aux nouvelles Cadillac des soins de longue durée sur un
nombre total de 40 000 personnes hébergées en soins de longue durée ? On
peut déjà imaginer que ça jouera du coude. Que les listes d’attente
seront longues.
S’il
est permis d’avoir des doutes, donc, quant à la pérennité de ce nouveau
modèle, on peut dire cependant que le projet est bâti sur une bonne
idée. Celle de donner des milieux de vie agréables et adaptés aux
personnes âgées et handicapées plutôt que de les condamner à vivre dans
un milieu hospitalier pour le restant de leurs jours.
Trouver
le modèle économique qui permettra de passer de l’idée à la réalité
pour tous sera un immense défi des prochaines années.
RD