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dimanche 2 juin 2019

L'autocompassion : s'aimer d'abord soi-même

Article du Dre Christine Grou, Journal de Québec, 2 juin 2019

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La compassion, c’est ce qui nous permet de comprendre ce que vit une autre personne, de partager sa souffrance et d’éprouver de la sympathie pour elle. Est-il possible, voire souhaitable, d’éprouver aussi de la compassion envers soi-même ? Si un doute persiste, sachez que les bienfaits de l’autocompassion sont démontrés.

Une charité bien ordonnée ?

Pour bien des gens, pratiquer l’adage « Charité bien ordonnée commence par soi-même » ne se fait pas sans culpabilité. Avec l’autocompassion, il est possible de se voir différemment et de se juger moins sévèrement, tout en prenant conscience de ce qui se passe en soi.

L’autocompassion nous ­permet aussi de bien analyser les demandes qui viennent de notre environnement extérieur, ­d’identifier nos désirs, de faire des choix et d’être capables de dire non. Elle nous aide à diminuer notre sentiment de culpabilité par ­rapport au fait de mettre des limites, le tout en fonction de nos besoins.

Si l’autocompassion nous invite à nous traiter avec ­bienveillance, elle n’est pas synonyme de ­faiblesse ou d’apitoiement. Une personne s’apitoyant sur son sort est vite ­submergée par ses ­problèmes, n’a aucun recul sur elle-même, et en vient à croire que tout lui est permis, dont les choses les plus nuisibles à sa santé. ­Contrairement à l’auto-­indulgence, ­l’autocompassion peut même ­stimuler le dépassement de soi.

Les composantes de l’autocompassion

D’abord, un peu de bonté envers soi-même est nécessaire à ­l’autocompassion, et cette ­bienveillance ne pourra qu’être bénéfique, et probablement encore davantage que de se juger trop sévèrement : un jugement trop dur est bien souvent le ­résultat ­d’attentes irréalistes face à soi-même.

Ensuite, avec ­l’autocompassion, on apprend à être plus sensible aux émotions et situations ­difficiles qu’on peut vivre. ­Impressions ou craintes de ne pas être à la hauteur, de ne pas donner assez au travail, de ne pas être assez présents pour nos proches ou nos parents vieillissants ? Rassurez-vous : tout le monde éprouve de tels sentiments à un moment ou à un autre. Croire que vous êtes la seule et unique personne vivant cette situation est une fausse croyance : tous les êtres humains traversent des périodes sombres où la culpabilité et l’autodépréciation les habitent.

Par ailleurs, il est également nécessaire de cultiver un esprit d’ouverture en matière d’autocompassion, question de voir et d’identifier plus facilement ce qui se passe à l’intérieur de soi. Non pas pour supprimer ses pensées ou encore minimiser la situation, mais plutôt pour atteindre un juste équilibre entre les événements de notre vie et toute l’attention et l’importance qu’on leur accorde au final. D’ailleurs, le fait de ­pratiquer la pleine conscience peut nous aider à prendre un temps d’arrêt afin d’être plus attentifs à ce qui se passe à l’intérieur de nous, et de le faire sans jugement ni ­culpabilité. Autant que possible avec la pleine conscience, on essaie de ne pas vivre dans le passé, de ne pas ­anticiper le futur et de se ­concentrer sur le temps présent.

Devenir son propre meilleur ami

Enfin, avec l’autocompassion, on retrouve un principe ­important : se traiter de la même façon qu’envers la personne qu’on aime le plus. Lorsque l’on fait face à une difficulté, par exemple, il faut se demander ce qu’on ferait envers quelqu’un à qui l’on ne veut que du bien : qu’est-ce que je lui dirais ou lui donnerais comme conseil ? En prenant cette distance et en étant plus bienveillant par rapport à nous-mêmes, il devient alors plus facile de faire le deuil du « Moi » idéal, mais aussi et surtout de nous aimer pour ce que nous sommes.

 P.S. Dre Christine Grou est psychologue et présidente de l'Ordre des psychologues du Québec.

RD