Vivre la vie d'un Senior

dimanche 15 mai 2022

Aînés : des besoins sous-estimés et des soins insuffisants

 Article de Tommy Choinard, Journal La Presse, 11mai 2022

 Vérificateur général: gestion défaillante des contrats octroyés par les  cégeps | La Presse

 Guylaine Leclerc, vérificatrice générale

Soins insuffisants et besoins sous-estimés, dénonce la VG

Québec navigue à vue et ne fait pas une planification digne de ce nom de l’hébergement public de longue durée pour les aînés en grande d’autonomie, selon la VG.

 (Québec) En plus de ne pas donner à tous les aînés en grande perte d’autonomie des soins à domicile à la hauteur de leurs besoins, Québec sous-estime largement le coût supplémentaire qu’il devrait essuyer d’ici 2028 pour faire face au vieillissement de la population. Il fonce droit dans le mur, estime la vérificatrice générale Guylaine Leclerc. 

  « Si aucun changement n’est apporté, les aînés en grande perte d’autonomie n’auront pas tous accès à des soins de longue durée publics d’ici 2028 ni à une intensité de services suffisante. Cela est vrai tant en hébergement de longue durée qu’en soutien à domicile », écrit-elle dans son rapport déposé mercredi à l’Assemblée nationale.

Québec navigue à vue et ne fait pas une planification digne de ce nom de l’hébergement public de longue durée pour les aînés en grande perte d’autonomie. Il a lancé la construction de maisons des aînés, mais les places prévues sont à peine équivalentes au nombre de personnes en attente d’hébergement à l’heure actuelle. La demande ne fera que croître avec le temps, mais le gouvernement n’a pas de projections solides à ce sujet. Le nombre de lits en CHSLD a chuté de 15 % au cours des dernières années. 

[Québec] n’a pas non plus défini comment il réorganiserait et financerait les soins de longue durée dans le contexte du virage vers le soutien à domicile.

Extrait du rapport de la vérificatrice générale du Québec

Ce virage connaît des ratés. En 2020-2021, pour 59 % des 15 212 personnes de 70 ans ou plus en grande perte d’autonomie qui bénéficiaient de services de soutien à domicile, moins de 5 % de leurs besoins ont été comblés. L’intensité attendue des services n’est tout simplement pas au rendez-vous.

Le nombre moyen d’heures de services réellement donnés à un aîné en grande perte d’autonomie est « très nettement inférieur » à la norme que Québec a lui-même établie en 2006. La moyenne atteint 692 heures par année, alors que ce devrait être 1962.

Planification déficiente, selon la vérificatrice générale

La VG constate que les scénarios du MSSS en vue de répondre à une demande croissante au cours des prochaines années « ne prévoient aucun rattrapage visant à réduire le déficit de services actuel en soutien à domicile ». Ils « ne permettent pas de répondre aux besoins de tous les 25 599 aînés de 70 ans ou plus supplémentaires que prévoit le MSSS d’ici 2028-2029 et qui auront besoin de soins de longue durée comparables à ceux offerts en hébergement de longue durée, d’autant plus que ces prévisions de la demande sont incomplètes ».

D’ailleurs, Québec prévoit donner plus de soins à seulement 47 % à 68 % de ces aînés. L’offre de services qu’il entend offrir est insuffisante, puisque son « scénario privilégié » pour les prochaines années « représente moins du tiers du nombre d’heures de services requises pour un aîné en grande perte d’autonomie ».

La planification budgétaire est déficiente. La VG n’est pas arrivée à concilier les différentes données fournies par le ministère des Finances sur le sujet. Québec n’est pas capable de chiffrer le coût annuel des services de soutien à domicile pour un aîné, se contentant d’estimer vaguement que ce serait équivalent au coût d’hébergement en CHSLD public (près de 100 000 $ par année).

Les mesures additionnelles directes prévues par le gouvernement pour le soutien à domicile sont en moyenne de 340 millions par année d’ici 2025-2026. Et encore là, ces sommes sont destinées à toutes les clientèles, pas seulement aux aînés en grande perte d’autonomie.

Or, selon un calcul conservateur, Guylaine Leclerc estime qu’il faudrait 2 milliards de dollars de plus par année pour couvrir les besoins des aînés de 70 ans ou plus en grande perte d’autonomie en 2028. C’est donc dire que Québec sous-estime le coût d’environ 1,7 milliard de dollars.

Dans son rapport, elle déplore l’absence de réflexion sur le financement des soins, alors que « celle-ci permettrait d’analyser les sources de financement possibles telles que la contribution de l’État, celle des usagers et les mesures fiscales à mettre en place ou à améliorer. Jusqu’à ce jour, il n’y a pas d’orientation ministérielle quant à la contribution financière future exigée des usagers pour leur permettre de rester à domicile ».

La PDG du CISSS de la Gaspésie dans la tourmente

Le processus d’embauche des cadres et la gestion des contrats de service au CISSS de la Gaspésie « manquent de rigueur et de transparence », conclut la vérificatrice générale, Guylaine Leclerc. Elle dénonce également des « enjeux liés au climat de travail ». Au Salon bleu, la députée de Gaspé, la péquiste Méganne Perry Mélançon, a demandé la mise sous tutelle de l’organisme. Pour le ministre de la Santé, Christian Dubé, « les éléments qui ont été soulevés par la VG méritent une attention particulière dans les prochaines semaines. Mais il y a déjà un changement de PDG qui a été opéré, alors on est là ». Dans les faits, la PDG Chantal Duguay devait partir à la retraite à la fin de son contrat, le 31 mars, mais comme le processus de sélection de son successeur rencontre des problèmes, elle continue de diriger le CISSS pour le moment. 

  • Dans les soins à domicile, « on a fait plus que tout ce qui a été fait dans le passé, mais on ne peut pas tout rattraper en même temps. Il faut avoir les gens pour aller les donner, les soins à domicile. Il faut les embaucher, les former, on est là-dedans ».
     
    (Marguerite blais, ministre responsable des Aînés et des Proches aidants)

 RD

Milieux de vie plus humains: bravo Mme la ministre

 Article de Josée Legault, Journal de Montréal, 5 mai 2022

CHSLD: la ministre Marguerite Blais témoignera devant la coroner

L’héritage politique de Marguerite Blais s’annonce majeur et unique. Lorsqu’elle aura terminé son mandat, elle pourra partir la tête bien haute.

Au Québec, on s’est beaucoup occupé du «mourir dans la dignité». Avec raison, bien sûr. À l’opposé, assurer le «vivre dans la dignité» aux plus vulnérables d’entre nous est un échec pitoyable. Autant social que politique.

L’hécatombe de la 1re vague dans les CHSLD nous l’a jeté en plein visage. Ces «milieux de vie» étaient en fait négligés depuis des décennies. Idem, soit dit en passant, pour l’hébergement et les services pour personnes handicapées intellectuelles de tous âges.

D’où l’importance de l’annonce par Marguerite Blais d’un Plan d’action ambitieux sur l’hébergement de longue durée pour toutes ces personnes. Étoffé et minutieux, son plan profitera de 2,9 milliards de dollars sur 5 ans.

La vision de la ministre des Aînés et des Proches aidants est claire: humaniser et équiper beaucoup mieux ces milieux de vie qui, de plus en plus, deviennent aussi des milieux de soins.

L’objectif de Mme Blais est d’inverser la logique tordue du système actuel de services sociaux. Au lieu d’obliger les résidents à s’adapter aux besoins des ressources où elles vivent, la ministre entend donc faire le contraire. Enfin.

Parce que ces besoins ne s’arrêtent pas à choisir son heure du lever, son déjeuner, ses soins d’hygiène ou sa déco, son plan va nettement plus loin. Il prévoit des activités physiques. Une meilleure alimentation. Des sorties.

D’engager enfin les proches aidants comme de vrais partenaires dans le cheminement des résidents. Des mécanismes de reddition de comptes. Etc.

 Bref, d’y mettre de la vie, du cœur... et de la surveillance.

Même pas une simple marche dehors...

Parmi les CHSLD et les ressources intermédiaires ou de type familial (RI-RTF) où vivent des milliers d’aînés et d’adultes handicapés intellectuels, on trouve certes des ressources de qualité. Le problème est qu’il y en a aussi de mauvaises. Plein de familles le savent. D’où ce plan.

On trouve des milieux de vie qui, de fait, sont des parkings. Avec peu ou pas d’activités physiques et de stimulation cognitive. Peu ou pas de sorties. La télé comme substitut à temps plein.

Même prendre régulièrement une marche à l’extérieur, à pied ou en chaise roulante, est souvent refusé. Le tout débouchant sur des résidents en bien moins bonne santé, physique, cognitive et émotive.

Vous voudriez vivre comme ça? C’est pourtant la réalité de plusieurs personnes en hébergement. Malgré même la présence soutenue de la famille.

Un riche héritage politique

Donc, bravo à Marguerite Blais pour sa détermination à vouloir humaniser ces milieux de vie et de soins. Bravo aussi pour la première loi québécoise sur les proches aidants qu’elle a fait adopter et le premier plan crédible contre la maltraitance des personnes vulnérables.

Tous reposent sur un changement profond de culture sociale et politique. En cela, l’héritage de Marguerite Blais s’annonce majeur. Quoi que certains en disent, lorsqu’elle aura terminé son mandat, elle pourra partir la tête haute.

Et c’est bien là le plus inquiétant: la suite. Qui, après elle, verra à concrétiser son legs sur le terrain? Qui François Legault choisira-t-il après l’élection pour lui succéder dans ce poste névralgique?

Il serait sage de choisir une personne passionnée comme elle pour les personnes vulnérables – ce «peuple invisible», pour reprendre son expression fort juste.

Une personne qui, comme elle, possède un large bagage de connaissances sur le sujet. Une personne qui, comme elle et Christian Dubé, ne sera pas issue non plus du sérail médical.

Car pour réformer un système englué depuis longtemps dans ses propres dysfonctionnements, mieux vaut ne pas en avoir fait partie soi-même.

RD

CHSLD et autres établissements publics: Blais promet d’adapter les soins aux résidents

 Article de Patrick Bellerose, Journal de Montréal, 5 mai 2022

Patrick | Le Journal de Montréal

Au crépuscule de sa vie politique, la ministre responsable des Aînés promet de changer la façon de traiter les ainés vivant dans des établissements publics, notamment en adaptant les soins et l’heure du déjeuner à leur horaire.

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Marguerite Blais a présenté jeudi un plan d’action de 25 mesures doté d’une enveloppe de 2,9 milliards $ sur cinq ans.  

Les détails étaient peu nombreux lors de la conférence de presse, mais la ministre assure que la qualité de vie des aînés en sera transformée au cours des prochaines années.  

Mme Blais souligne que les CHSLD, les ressources intermédiaires, les ressources de type familial, ainsi que les maisons des aînés et les maisons alternatives devront désormais s’adapter aux besoins des résidents, et non l’inverse.  

Son gouvernement promet «d’offrir aux personnes hébergées des milieux de vie et de soins à échelle humaine, inclusifs, agréables et adaptés à leurs besoins et préférences».  

Par exemple, le déjeuner sera servi à l’heure décidée par le résident. «Il est important de s’adapter au rythme de la personne hébergée et de lui offrir le repas du matin à leur de son choix, affirme Mme Blais. Il s’agit de respecter l’histoire de vie de la personne et de personnaliser ses soins le plus possible.»     

L’enjeu des ressources

La mise en place de cette nouvelle pratique est déjà en cours dans certains établissements, assure la ministre, sans fournir un échéancier précis pour compléter son plan.  

Son cabinet a par la suite précisé comment se déclinera l’enveloppe de 1,85 G$ dédié à bonifier la prestation de services. Ainsi, Québec cherche à embaucher : 370 gestionnaires de CHSLD, 200 pharmaciens, 67 chargés de projet en soutien clinique, 20 dentistes, 30 denturologistes, 59 hygiénistes dentaires, en plus de consacrer 10 M$ pour bonifier la main d’œuvre dans les services alimentaires.  

Mais la part du lion ira aux quelque 10 000 nouveaux préposés aux bénéficiaires promis au début de la pandémie, dont la grande majorité est déjà en poste.  

Le cabinet de Mme Blais assure toutefois que les changements proposés peuvent être réalisés sans embauche massive, en adoptant simplement une nouvelle approche. 

RD