Vivre la vie d'un Senior

mardi 28 mai 2019

Le vieillissement est en partie réversible

Article de Valérie Bidégaré, Journal de Québec, 26 mai 2019



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La diminution des capacités cognitives, de la mobilité musculaire et de l’autonomie – qu’on associe souvent au vieillissement – ne sont pas des changements irréversibles qui s’opèrent avec l’âge. Loin d’être condamné à l’obsolescence programmée, le corps humain peut demeurer en excellent état au-delà de 65 ans à condition d’en prendre soin.


C’est du moins le constat du physiothérapeute, auteur et conférencier Denis Fortier, qui souhaite briser les stéréotypes selon lesquels dès l’âge de 40 ans, l’humain s’engage sur une pente descendante et dépérit de façon systématique.

«Le corps, c’est une machine qui s’adapte à ce que l’on fait, à notre environnement», dit M. Fortier auteur du livre C’est normal à votre âge ? «On peut reprendre de l’endurance, on peut regagner de la mobilité musculaire, de l’équilibre, des capacités cognitives et même de l’autonomie pour ceux qui en ont perdu», explique-t-il.

M. Fortier s’est donné comme objectif de fournir des «arguments musclés» aux gens qui se sont fait dire par des professionnels de la santé ou encore par un employeur qu’il est «normal» à leur âge d’être moins performants au travail, d’apprendre moins, de voir certaines de leurs capacités réduites.

«J’espère être une certaine courroie de transmission entre les nouvelles données qu’on n’avait pas il y a 5-10-15 ans et la population», lâche le professionnel de la santé.


Super 4

Si les infections étaient responsables de la majorité des décès, par le passé, c’est aujourd’hui les maladies chroniques qui s’avèrent des «tueuses en série», selon Denis Fortier.

Le physiothérapeute soutient que les bienfaits du «super 4», soit de ne pas fumer, de pratiquer au moins 30 minutes d’exercice par jour à raison de cinq fois par semaine, de maintenir son indice de masse corporelle sous la barre du 30 et de manger sainement, pourraient toutefois réduire les risques de maladies chroniques de 78 %.

«On peut également augmenter l’espérance de vie de 13 ans», soutient l’expert. «Les maladies chroniques, c’est tellement rentré dans notre cerveau que ce sont les médecins qui les traitent, et tant mieux si c’est le cas, mais on ne dit jamais assez que ces maladies chroniques là se préviennent dans l’immense majorité des cas», ajoute M. Fortier.

Il en va de même pour des pathologies telles que l’arthrite, l’arthrose et même l’Alzheimer, l’une des maladies les plus redoutées, selon le professionnel de la santé.

«C’est un mythe que de croire qu’à partir de 50 ans, c’est normal d’avoir des pertes de mémoire», expose M. Fortier. «Est-ce que j’ai vérifié si je dors bien, je mange bien, je bouge bien, si je suis anxieux ou dépressif? La même logique s’applique pour la douleur. Associer la cause du problème au vieillissement directement, c’est ce qui devient un mythe destructeur et qui nous empêche de prendre soin de nous.»

 Extrait du livre
C’est normal, À votre âge ?
DENIS FORTIER – Trécarré 

 
Des changements possibles

À cet effet, prendre soin de son sommeil serait à la base d’un corps en santé, selon M. Fortier, et ce, peu importe l’âge. L’auteur ajoute que la majorité des changements qui s’opèrent dans le corps en vieillissant sont en partie réversibles, ce que les gens ignorent.

«On gagne des choses en vieillissant et ça, on ne le dit pas bien bien souvent», se désole-t-il. «L’arthrose, ce sont des cartilages usés qui ne sont pas vascularisés, mais si on bouge les articulations régulièrement, ça va changer, ce n’est pas programmé», explique le physiothérapeute de formation.
«Il n’y a pas si longtemps, on ne savait pas qu’une personne de 80 ou 90 ans pouvait reprendre de la force et de l’endurance musculaire [...] C’est un processus en partie réversible. Les cartilages, les muscles, le cerveau. Si on en prenait soin par des petits gestes concrets et qu’on informait la population, nos coûts de santé diminueraient et on arriverait beaucoup mieux à prendre soin de notre monde et à allouer les ressources correctement», conclut-il.

La prévention : la clé

  • Trouver des trucs favorisant une bonne nuit de sommeil : diminuer notre exposition à la lumière avant d’aller au lit, se coucher et se lever à des heures fixes, n’utiliser son lit que pour dormir et avoir des rapports sexuels, ne pas rester plus de 30 minutes au lit si nous n’arrivons pas à dormir, etc.
  • Changer certaines habitudes de vie : opter pour des activités qui nous procurent du plaisir, qui nous permettent d’être moins assis, et nous motiver en les amorçant avec une autre personne.
  • Mettre la culpabilité de côté.
  • Privilégier la stimulation cognitive : apprendre une seconde langue ou à jouer d’un instrument de musique afin de garder notre cerveau actif et en santé.
  • Pratiquer des activités qui font travailler le système cardiovasculaire : marcher au moins 30 minutes par jour d’un bon rythme afin de préserver la santé de notre cerveau, réduire les risques d’obésité, mais aussi d’accident vasculaire cérébral, notamment.
  • Accepter de sortir de sa zone de confort.

Mythes associés au vieillissement

  • On ne peut rien contre la douleur en vieillissant.
  • Les pertes de mémoire ne s’expliquent que par le vieillissement.
  • Les douleurs articulaires sont causées par le vieillissement.
  • La santé passe par le nombre de médicaments ingurgités.
  • Les processus liés au vieillissement sont tous irréversibles.
  • La perte de force musculaire est uniquement liée au vieillissement.
  • Nous sommes vieux à partir de 65 ans.

5 choses qu’on ne vous dit pas sur votre santé

 

1. La douleur ne fait pas partie du processus normal de vieillissement et vous n’y êtes pas condamné. Elle se manifeste toutefois différemment au fil du temps notamment par certains changements physiologiques. L’utilisation du chaud et du froid, la méditation pleine conscience, et une bonne compréhension de ce qui influence la douleur, entre autres, peuvent en venir à bout.

2. La consommation d’opioïdes ne règle pas tous les maux. Selon l’auteur du livre, la médication ne fait que traiter la conséquence d’un problème de santé et non la cause. Si vous consommez des opioïdes sur une base régulière, il est préférable de vous informer de leurs effets dommageables qui seraient trois fois plus élevés que ceux des autres types de traitements, et cela s’accentue avec l’âge.

3. L’inflammation chronique est l’un des ennemis les plus sous-estimés de notre espérance de vie. Elle cible particulièrement le cœur, le cerveau, les intestins, les vaisseaux sanguins et les articulations pour y créer des problèmes de santé. Plus on avance en âge, plus on y est prédisposé, mais éviter la suralimentation, la malbouffe, le tabagisme et les longues heures assis sur une chaise permet de s’en tenir loin.

4. Le risque d’obésité augmente avec l’âge puisque le métabolisme de base diminue avec les années. Pour contrer ce ralentissement, il est possible d’augmenter le métabolisme de base en effectuant des exercices qui stimulent la masse musculaire afin de permettre de dépenser davantage d’énergie, et ce, même au repos.

5. S’ils ont apporté des bénéfices importants, les médicaments, lorsqu’utilisés de façon excessive, peuvent avoir des conséquences dévastatrices sur votre qualité de vie et votre longévité, selon Denis Fortier. Troubles de mémoire, problèmes cognitifs, plus grand risque de chute, d’infection, d’hospitalisation peuvent survenir lorsqu’ils sont consommés en grande quantité et à fortes doses.

  RD

dimanche 26 mai 2019

Vous avez dit « signes religieux »

Article de Fatima Houda-Pepin, Journal de Québec, 26 mai 2019


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Plusieurs avaient été surpris, le 9 mai dernier, quand j’avais déclaré, lors de mon intervention en commission parlementaire sur le projet de loi 21, Loi sur la laïcité de l’État, qu’il n’existe pas de « signe religieux » en islam.

En effet, aucune source autorisée, à savoir le Coran et les Hadiths du prophète, ne parle de « signe religieux » et encore moins du voile comme l’expression symbolique de cette religion.

Un sacrilège

Même chez les théologiens fondamentalistes qui tordent le cou aux versets coraniques pour leur faire dire ce qu’ils ne disent pas, afin d’imposer le voile aux musulmanes comme « obligation religieuse », ils sont les premiers à se hérisser quand ils voient un fichu élevé en symbole de leur religion.

Dans le tumulte entourant le projet de loi sur l’interdiction des signes religieux dans les écoles publiques, en France, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, avait effectué un voyage en Égypte, le 30 décembre 2003, pour chercher appui auprès des autorités religieuses de la prestigieuse Université Al Azhar.

Il espérait leur arracher une déclaration qui apaiserait les tensions au sein des musulmans de France, à la veille de son adoption, le 10 février 2004.

Quelle ne fut pas sa surprise quand il s’est fait rappeler à l’ordre sur les fausses représentations que l’on se faisait de l’islam en Occident ! En effet, le Dr Ali Jumâa, mufti d’Égypte et membre de l’Académie de recherches islamiques n’a pas manqué de lui exprimer sa désapprobation. Le voile, dit-il, « n’est en aucun cas un signe religieux ».

Un avis confirmé par son prédécesseur, l’ancien mufti d’Égypte, Dr Farid Ouassil, qui a tenu à remettre les pendules à l’heure : « Nous ne pouvons accepter que l’on présente le voile comme un signe religieux. »

Quand on sait que dans l’islam sunnite majoritaire la simple représentation visuelle du prophète Mohamed est interdite et qu’elle peut parfois provoquer une tragédie, comme celle de Charlie Hebdo, on peut comprendre que pour des théologiens gardiens de l’orthodoxie islamique, élever un fichu au rang de symbole de leur religion, c’est quasiment un sacrilège.

Et l’interdiction ?

Alors si « le voile dit islamique » n’est pas un « signe religieux », peut-on en interdire le port par voie de législation en Occident ?

Le Grand Mufti d’Al Azhar et interprète officiel du droit musulman, Mohamed Tantaoui, avait répondu par l’affirmative à Nicolas Sarkozy, non pas que le voile soit un « signe religieux », mais parce que le musulman vivant en Occident doit se conformer à la loi de son pays d’adoption, incluant la laïcité.

« Le musulman est tenu de se plier aux lois du territoire où il vit », lui avait-il déclaré. (La Croix, le 10 mars 2010).

Donc, pour cette haute autorité religieuse qui émet des avis juridiques (fatwas), « La femme musulmane [qui] vit dans un pays non musulman, comme la France, dont les responsables veulent adopter des lois opposées au voile, c’est leur droit et ne je peux pas m’y opposer ». (Libération, le 31 décembre 2003).

Ainsi, vue d’une perspective musulmane, « la loi du pays est la loi ». Ce message, quoique de portée générale, s’adressait aussi aux jeunes musulmanes des écoles publiques, qui se voyaient contraintes, à la veille de l’adoption de la loi française, d’ôter leurs foulards.

À la veille de l’adoption du projet de loi 21 sur la laïcité de l’État et pour éviter toute confusion autour des « signes religieux », le gouvernement québécois gagnerait à en donner une définition claire, comme il l’a fait pour le concept de laïcité. Après tout, « le législateur ne parle pas pour ne rien dire » et le diable est dans les détails !

RD

vendredi 24 mai 2019

Les six dates qui ont fait « le voile dit islamique »

Article de Fatima Houda-Pepin, Journal de Québec, 22 mai 2019

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À l’origine, il y a eu le voile que les femmes de différentes traditions, cultures et religions ont porté et continuent de porter, un peu partout dans le monde.

Dans l’islam, il est mentionné dans au moins six versets du Coran, avec des significations et des contextes très différents. Aucun n’en fait une obligation religieuse (voir mon texte dans La Presse du 15 janvier 1994, «Voile : les femmes musulmanes ne sont pas un groupe monolithique»).

Du voile islamiste

D’aucuns veulent bien l’ériger en pilier de l’islam. Or, il y a cinq obligations religieuses dans l’islam, et le voile n’en fait pas partie.

Pourquoi alors l’ériger en droit fondamental, assimilé à une liberté de religion? Et qui a intérêt à en faire un droit fondamental? (Voir ma chronique du 17 avril dernier, Aux origines du “voile dit islamique” : la prostitution.)

Force est de constater que cette revendication de voile comme obligation religieuse est portée par des groupes salafistes, wahhabites et djihadistes qui sont dans une lutte sans merci avec l’Occident, ses symboles et ses valeurs.

C’est une obsession maladive qui remonte aux idéologues du wahhabisme et du salafisme, comme Ibn Taymiyya, Sayyid Qutb, Hassan el-Banna, Youssef al-Qardaoui et bien d’autres.
Ceux et celles qui défendent le voile comme droit individuel assimilé à la liberté de religion gagneraient à lire ces «grands savants de l’apocalypse» pour savoir qui sont leurs alliés stratégiques dans ce combat d’arrière-garde.

Défendre les droits de la personne, j’en suis. Mais peut-on rester scotché au « libre choix » sans remettre en question le bien-fondé de ce que l’on défend? Peut-on fermer les yeux sur les impacts de ce djihad juridique sur les droits des femmes?

Au djihad juridique

Pourtant, il est à l’œuvre depuis plusieurs décennies :

1. En 1928, Hassan el-Banna, un instituteur égyptien, fonda la société secrète des Frères musulmans avec un programme digne du totalitarisme et, déjà, le voilement des femmes était au centre de leurs préoccupations.

2. En 1953, le président égyptien Gamal Abdel Nasser, voulant les intégrer dans le jeu politique, consulta leur guide suprême sur les propositions qu’il entendait faire au gouvernement. Sa principale demande était d’imposer le voile à toutes les Égyptiennes. Nasser refusa.
3. Début des années 1970, l’Arabie saoudite va accentuer son offensive d’islamisation en déployant ses tentacules wahhabites dans le monde arabo-musulman, en Europe et au Canada (financement de mosquées, d’écoles, de centres culturels, de programmes d’études islamiques, envoi d’imams avec solde et de prédicateurs salafistes, déploiement de chaînes de télévision satellitaires dédiées à la propagation du wahhabisme, etc.), le tout s’accompagnant de campagnes de voilement des femmes et des petites filles et d’implantation de la charia.

4. En 1979, l’ayatollah Khomeiny rentra à Téhéran après quinze ans d’exil. L’une de ses premières décisions avait été d’imposer le tchador à toutes femmes, y compris les petites filles, un fardeau dont elles s’étaient libérées depuis 1936.

5. En 1989, la France est secouée par une crise du foulard. Les islamistes montèrent aux barricades. Ils ont revendiqué le voile comme porte-étendard de leur «identité politique».

6. En 2015, dans le pays des calinours, nos tribunaux avaient invalidé une directive du gouvernement Harper qui interdisait aux femmes de prêter le serment de citoyenneté avec leur niqab.

Faut-il aussi accepter la burqa, cette tenue dégradante pour la dignité des femmes? Est-ce pour cela que le Canada est allé faire la guerre aux talibans?

RD

mercredi 15 mai 2019

Le projet de loi sur la laïcité n'est pas «anti-islamique», selon Guy Rocher

Article de Caroline Plante, La presse canadienne, 14 mai 2019

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Selon le sociologue, Guy Rocher,

Le projet de loi 21 du gouvernement Legault vise l’islam, mais n’est pas anti-islamique, soutient le sociologue émérite Guy Rocher, un des artisans de la Révolution tranquille.

Ce n’est la faute de personne si en 2019 l’islam est une religion “particulièrement visible”, a exposé le professeur de 95 ans lors de son passage mardi devant la Commission des institutions, qui étudie le projet de loi visant à interdire les signes religieux aux employés de l’État en position d’autorité, dont les enseignants.

Si le projet de loi 21 est adopté, une enseignante musulmane, par exemple, devra laisser son hidjab à la maison.

À une autre époque, ça aurait été le catholicisme qui aurait été visible, a plaidé M. Rocher. “En ce moment, c’est l’islam. (...) C’est, parmi toutes les religions, celle qui est la plus militante en ce moment, celle qui se manifeste le plus clairement, le plus visiblement”, a-t-il déclaré.

″À cause de cette conjoncture, je dirais que la loi tombe mal en un sens. Si on avait fait la loi il y a 20 ans, peut-être qu’on n’aurait pas eu la même réaction, on ne lui aurait pas attribué la même islamophobie”, a-t-il poursuivi.

le gouvernement du Québec a la responsabilité de légiférer pour établir l’égalité entre les religions.

Le projet de loi 21 du gouvernement Legault vise l’islam, mais n’est pas anti-islamique, soutient le sociologue émérite Guy Rocher, un des artisans de la Révolution tranquille.


À l’heure actuelle, le problème de l’islam, c’est sa grande visibilité: “C’est le problème que ça pose en ce moment. Ce n’est pas une loi anti-islamique, contre l’islam, il se trouve qu’en ce moment la religion qui est visible, c’est l’islam. (...) La société n’est pas obligée d’accepter ça.”

Selon lui, le gouvernement du Québec a la responsabilité de légiférer pour établir l’égalité entre les religions, quitte à provoquer une crise sociale. “On n’aurait pas fait la loi 101 si on avait eu peur que a suscite une crise”, a-t-il lancé, sourire aux lèvres.

Guy Rocher s’est aussi montré favorable à l’utilisation de la clause dérogatoire, afin que la loi sur la laïcité puisse s’appliquer telle quelle pendant au moins cinq ans.

En plus d’avoir participé à la rédaction de la Charte de la langue française en 1977, M. Rocher a été membre de la commission Parent, qui s’est penchée sur l’état de l’éducation au Québec dans les années 1960.

 Rocher répond à Bouchard

Par ailleurs, le sociologue a pris le temps de répondre à son confrère, Gérard Bouchard, qui demandait la semaine dernière de voir des preuves qu’une enseignante voilée faisait du prosélytisme auprès de ses élèves.

Selon M. Rocher, il est scientifiquement impossible de faire ces preuves. “La recherche que demande M. Bouchard est méthodologiquement à peu près impossible à faire pour qu’elle soit scientifiquement valable”, a-t-il indiqué.

Selon le chercheur, il faut arrêter de penser qu’un projet de loi est pour le présent. Il a rappelé que le paysage religieux au Québec avait beaucoup changé depuis 30 ans, et qu’il se métamorphosera de nouveau.

“Personne ne peut dire que l’islam continuera à avoir cette présence. Il est bien possible que les Témoins de Jéhovah tout à coup surgissent, que des Évangélistes s’affirment plus tard”, a-t-il déclaré.
Pour l’instant, le problème de l’islam, c’est sa grande visibilité: “C’est le problème que ça pose en ce moment. Ce n’est pas une loi anti-islamique. Il se trouve qu’en ce moment la religion qui est visible, c’est l’islam.

“S’il y a une religion qui se veut plus visible, (...) la société n’est pas obligée d’accepter ça”, a-t-il argué.

Selon lui, le gouvernement a la responsabilité de légiférer pour établir l’égalité entre les religions, quitte à provoquer une crise sociale. “On n’aurait pas fait la loi 101 si on avait eu peur que ça suscite une crise”, a-t-il lancé, sourire aux lèvres.

Guy Rocher s’est aussi montré favorable à l’utilisation de la clause dérogatoire, afin que la loi sur la laïcité puisse s’appliquer telle quelle pendant au moins cinq ans.

RD

Pourquoi je suis pour la laïcité?

Article de Fatima Houda-Pepin, journal de Québec, 15 mai 2019
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Je viens du Maroc, un pays où l’islam est religion d’État. J’ai grandi dans la première ville musulmane à y avoir été fondée, au 7e siècle, par un descendant du prophète Mahomet.

 Son sanctuaire est depuis un lieu de pèlerinage où convergent, chaque année, des dizaines de milliers de fidèles.

 Un islam serein

 À l’appel de la prière, cinq fois par jour, les fidèles convergeaient vers la mosquée dans le recueillement, tout en piété et en sérénité.

 Les chants et la musique accompagnaient toutes les cérémonies, surtout durant le moussem, un festival religieux qui s’y tenait et se tient toujours, chaque été.

 Des groupes spirituels, de diverses confréries, s’y produisaient en procession, aux rythmes de la musique sacrée.

 L’islam de mon enfance et de ma jeunesse était synonyme de joie, de fête, de plaisir, de partage, de recueillement et de simplicité.

 À l’école coranique que j’ai fréquentée, jamais mon imam ne m’avait demandé de mettre un foulard, et encore moins ne m’avait enseigné que c’était une obligation religieuse.

 Le foulard était plutôt porté par les femmes de la génération de ma mère et de ma grand-mère, comme accessoire vestimentaire traditionnel, par modestie, par coquetterie, par goût ou par convenance, selon les circonstances.

 De ce vécu, dans un milieu traditionaliste imprégné de spiritualité et de ferveur sans excès, je garde un profond respect pour la foi sincère des croyant-e-s.

 Une expérience qui m’a amenée, au fil des ans, à bien distinguer ce qui est de l’ordre du religieux, et que je respecte, et ce qui est de l’ordre de l’instrumentalisation des religions, et que je combats.

 C’est parce que la liberté de religion est une valeur fondamentale qu’il faut la protéger contre les assauts des extrémistes qui cherchent à la pervertir pour imposer leur programme politique.

 C’est ce que j’ai fait à 16 ans, quand j’ai donné, au Maroc, ma première conférence publique sur la situation juridique de la femme en islam. Les contours de la laïcité s’esquissaient déjà dans mon esprit.

 L’islam, ce n’est pas l’islamisme

 Quel ne fut pas mon choc quand j’ai découvert, au Québec et au Canada, dès le milieu des années 1970, un islam vindicatif, vociférant la haine à l’égard des mécréants, juifs, chrétiens et surtout musulmans laïcs.

 Un islam où tous les interdits sont imposés aux femmes et tous les droits accordés aux hommes.

C’est ici aussi que j’ai appris que la musique et la mixité hommes-femmes étaient haram (interdites).
 Par mes origines, je suis issue des Premières Nations d’Afrique du Nord, les Berbères (de leur vrai nom, Imazighen) qui avaient adopté, au fil des siècles, le christianisme, le judaïsme puis l’islam.

 Des personnages berbères ont laissé leurs empreintes dans les dynasties qu’ils avaient fondées, en Afrique du Nord, mais aussi dans les trois religions monothéistes.

 Ils ont ainsi donné au christianisme l’un de ses plus brillants esprits, Saint-Augustin, au judaïsme, la Kahina, reine des Aurès qui s’est dressée contre les invasions arabes au 7e siècle, et à l’islam, Tariq ibn Ziyad, gouverneur de l’Andalousie, dont Gibraltar porte encore le nom (Jabal Tariq, en arabe).

 Cette identité multiple me permet d’apprécier, sans complaisance, l’apport inestimable de chacune de ces trois traditions monothéistes, tout en dénonçant ouvertement les dérives qui les traversent.

 C’est ainsi que je me suis intéressée, très tôt, aux phénomènes religieux parce que les religions s’intéressent aux femmes et qu’elles sont porteuses de courants radicaux qui menacent leurs droits.

 Depuis 1985, je ne compte plus les conférences nationales et internationales que j’ai données ou organisées sur la laïcité, la neutralité religieuse de l’État, l’islam et le dialogue interreligieux, avec un constat sans appel : il n’y a pas de religion qui soit féministe.

RD