Leur corps change avec l'âge.
Certains ont eu le même conjoint pendant des décennies, d'autres ont
passé des années sans relation sexuelle. Les aînés ont parfois du mal à
aborder la sexualité avec leur nouveau partenaire. D'autant plus qu'elle
reste un sujet tabou, même dans le corps médical.
« Après plusieurs années, c'est délicat, c'est très sensible de
recommencer à vivre quelque chose de si intime », confie Béa*, 60 ans.
En couple pendant 25 ans, elle s'est séparée de son conjoint il y a 9
ans.
Durant ces années, elle n'a pas eu de relation sérieuse, seulement quelques aventures. Avec Ed*, 70 ans, elle confie cependant vivre une sexualité très épanouie. « Je me sens mieux dans mon corps aujourd'hui qu'il y a 10 ans. Je vis la même sexualité que celle que j'avais à 30 ou 40 ans. Je ne pensais pas revivre ça aussi intensément. » Pour elle, cette facilité vient aussi du fait qu'avec l'âge, « on sait ce que l'on veut et ce qu'on ne veut pas », et qu'on ne « craint pas de dire ce que l'on ressent ».
Avec son conjoint, elle note que la communication est prioritaire.
Si la sexualité, dans ces nouvelles relations, peut être vécue comme un renouveau, elle est parfois plus complexe. Isabelle Wallach, anthropologue et professeure au département de sexologie de l'Université du Québec à Montréal, a récemment mené une étude auprès de 25 Québécoises âgées de 65 ans et plus. Elle s'est aperçue que les femmes avaient quelquefois honte de leur corps et que cela pouvait représenter un frein pour s'engager dans une nouvelle relation.
« Il y a l'enjeu de la minceur, les signes physiques du vieillissement... Cela peut créer une réelle anxiété. Certaines vont la dépasser en trouvant des solutions comme éclairer à la bougie, se mettre sous les draps, avoir un peignoir à proximité. D'autres vont jusqu'à renoncer à la sexualité à cause de leur corps. »
- Isabelle Wallach, anthropologue et sexologue au département de sexologie de l'UQAM
« Les hommes ont des craintes à propos de leur puissance, redoutent de décevoir une femme pouvant avoir eu d'autres expériences sexuelles gratifiantes, ont des craintes concernant leur aspect physique qui reflète leur âge », ajoute Matey Mandza, docteur et chercheur en gérontologie et vice-président de l'Association québécoise de gérontologie. Les hommes font souvent état de difficultés érectiles ; les femmes, de sécheresse vaginale.
Alors, la sexualité évolue. « La performance et la satisfaction sexuelle demeurent importantes, mais elles s'accompagnent avec le temps d'une plus grande dose de tendresse. La sexualité est encore très importante, stimulante et essentielle », confie Ed.
Une sexualité plus à risque
La sexologue Isabelle Wallach regrette que, dans l'imaginaire collectif, la sexualité soit associée à la jeunesse et qu'on imagine les personnes âgées asexuées. « On a souvent une idée un peu romantique de la sexualité chez les aînés, avec un engagement, alors qu'il y a des unions ouvertes, des personnes qui ont de multiples partenaires, des hommes qui ont des relations sexuelles tarifées... Et finalement, on retrouve la même diversité que dans l'ensemble de la société », souligne-t-elle.
La sexualité des aînés est peu abordée par le personnel médical et ils ne font pas l'objet de sensibilisation sur les maladies sexuellement transmissibles. Résultat : « Les personnes âgées ne se considèrent pas comme à risque et beaucoup n'utilisent pas de condoms, observe Isabelle Wallach. Pourquoi ? Les hommes peuvent avoir des difficultés à en mettre un en cas de difficultés érectiles. Et on associe le préservatif avec la prévention de la grossesse. » Pour elle, il faut faire de la prévention dans les lieux où se trouvent les personnes âgées et mettre des condoms à leur disposition.
La situation en CHSLD
Aujourd'hui, dans les institutions comme les CHSLD, les allées et venues régulières du personnel soignant et les chambres partagées limitent les possibilités d'intimité des personnes âgées.
« Quel que soit leur état de santé, les aînés institutionnalisés peuvent avoir envie et être capables de conserver une activité sexuelle. Le personnel doit se montrer compréhensif et tolérant et proscrire toute attitude négative telle que la répression, la culpabilisation, la moralisation ou la dérision. »
- Matey Mandza, gérontologue
Pour Matey Mandza, cela passe par une formation adéquate. Il estime que « les soignants devraient apprendre à respecter l'intimité des résidants, par exemple, en frappant avant d'entrer dans une chambre ».
« Même la masturbation peut devenir difficile. Les professionnels ont une vision erronée et âgiste de la sexualité », regrette Isabelle Wallach. Elle remarque que, depuis quelques années cependant, il y a un réel intérêt pour le sujet de la part du personnel médical et que les choses commencent à évoluer.
Le centre d'hébergement Paul-Émile-Léger, à Montréal, a d'ailleurs mis en place en 2004 une « chambre d'intimité », qui permet à ses résidants de s'isoler.
* Les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés.
RD
Durant ces années, elle n'a pas eu de relation sérieuse, seulement quelques aventures. Avec Ed*, 70 ans, elle confie cependant vivre une sexualité très épanouie. « Je me sens mieux dans mon corps aujourd'hui qu'il y a 10 ans. Je vis la même sexualité que celle que j'avais à 30 ou 40 ans. Je ne pensais pas revivre ça aussi intensément. » Pour elle, cette facilité vient aussi du fait qu'avec l'âge, « on sait ce que l'on veut et ce qu'on ne veut pas », et qu'on ne « craint pas de dire ce que l'on ressent ».
Avec son conjoint, elle note que la communication est prioritaire.
Si la sexualité, dans ces nouvelles relations, peut être vécue comme un renouveau, elle est parfois plus complexe. Isabelle Wallach, anthropologue et professeure au département de sexologie de l'Université du Québec à Montréal, a récemment mené une étude auprès de 25 Québécoises âgées de 65 ans et plus. Elle s'est aperçue que les femmes avaient quelquefois honte de leur corps et que cela pouvait représenter un frein pour s'engager dans une nouvelle relation.
« Il y a l'enjeu de la minceur, les signes physiques du vieillissement... Cela peut créer une réelle anxiété. Certaines vont la dépasser en trouvant des solutions comme éclairer à la bougie, se mettre sous les draps, avoir un peignoir à proximité. D'autres vont jusqu'à renoncer à la sexualité à cause de leur corps. »
- Isabelle Wallach, anthropologue et sexologue au département de sexologie de l'UQAM
« Les hommes ont des craintes à propos de leur puissance, redoutent de décevoir une femme pouvant avoir eu d'autres expériences sexuelles gratifiantes, ont des craintes concernant leur aspect physique qui reflète leur âge », ajoute Matey Mandza, docteur et chercheur en gérontologie et vice-président de l'Association québécoise de gérontologie. Les hommes font souvent état de difficultés érectiles ; les femmes, de sécheresse vaginale.
Alors, la sexualité évolue. « La performance et la satisfaction sexuelle demeurent importantes, mais elles s'accompagnent avec le temps d'une plus grande dose de tendresse. La sexualité est encore très importante, stimulante et essentielle », confie Ed.
Une sexualité plus à risque
La sexologue Isabelle Wallach regrette que, dans l'imaginaire collectif, la sexualité soit associée à la jeunesse et qu'on imagine les personnes âgées asexuées. « On a souvent une idée un peu romantique de la sexualité chez les aînés, avec un engagement, alors qu'il y a des unions ouvertes, des personnes qui ont de multiples partenaires, des hommes qui ont des relations sexuelles tarifées... Et finalement, on retrouve la même diversité que dans l'ensemble de la société », souligne-t-elle.
La sexualité des aînés est peu abordée par le personnel médical et ils ne font pas l'objet de sensibilisation sur les maladies sexuellement transmissibles. Résultat : « Les personnes âgées ne se considèrent pas comme à risque et beaucoup n'utilisent pas de condoms, observe Isabelle Wallach. Pourquoi ? Les hommes peuvent avoir des difficultés à en mettre un en cas de difficultés érectiles. Et on associe le préservatif avec la prévention de la grossesse. » Pour elle, il faut faire de la prévention dans les lieux où se trouvent les personnes âgées et mettre des condoms à leur disposition.
La situation en CHSLD
Aujourd'hui, dans les institutions comme les CHSLD, les allées et venues régulières du personnel soignant et les chambres partagées limitent les possibilités d'intimité des personnes âgées.
« Quel que soit leur état de santé, les aînés institutionnalisés peuvent avoir envie et être capables de conserver une activité sexuelle. Le personnel doit se montrer compréhensif et tolérant et proscrire toute attitude négative telle que la répression, la culpabilisation, la moralisation ou la dérision. »
- Matey Mandza, gérontologue
Pour Matey Mandza, cela passe par une formation adéquate. Il estime que « les soignants devraient apprendre à respecter l'intimité des résidants, par exemple, en frappant avant d'entrer dans une chambre ».
« Même la masturbation peut devenir difficile. Les professionnels ont une vision erronée et âgiste de la sexualité », regrette Isabelle Wallach. Elle remarque que, depuis quelques années cependant, il y a un réel intérêt pour le sujet de la part du personnel médical et que les choses commencent à évoluer.
Le centre d'hébergement Paul-Émile-Léger, à Montréal, a d'ailleurs mis en place en 2004 une « chambre d'intimité », qui permet à ses résidants de s'isoler.
* Les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés.
RD
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