Vivre la vie d'un Senior

mercredi 4 juillet 2012

Vieillissement : la théorie de l'activité


Beaucoup de Seniors essaient de comprendre le niveau d'activité souhaitable ou convenant à leur âge respectif. Par ailleurs, en raison de l'allongement de la vie et aussi de la pénurie de main-d'oeuvre, la société québécoise comme d'autres en Europe (Allemagne, France, ...) voudraient garder les travailleurs le plus longtemps possible sur le marché du travail. 

Où se situe donc le point d'équilibre afin que tout le monde y trouve son compte? La théorie de l'activité permet de mieux situer les attentes des personnes qui prennent de l'âge, dans le cadre d'un vieillissement réussi et les limites qui sont imposées à une société dite vieillissante.

La théorie de l'activité, selon Jean-Luc Hétu, psychologue, est la plus ancienne des théories psychologiques du vieillissement. Elle remonte à la fin des années 40 lorsque Ruth Albrecht entreprit sa thèse de doctorat sur les « Les rôles sociaux des personnes âgées ». En 1953, Albrecht publiait avec Robert Havighurst un volume intitulé « Older people » qui a été réédité jusqu'en 1980.

La philosophie de fond de la théorie de l'activité

Les premiers conseils à retenir de la part de ces auteurs et qui s'adressent aux personnes âgées sont les suivants :

  • Prendre soin de son corps. Il est possible pour la plupart des gens de conserver une bonne partie de la vigueur et de l'attrait physique de leur maturité, s'ils font un effort...;
  • Découvrir et cultiver de nouvelles amitiés. Lorsqu'on perd un de ses vieux amis, on peut s'en faire de nouveaux... ;
  • Développer des intérêts pour les question sociales et pour la vie du milieu (...) Les personnes âgées peuvent faire des lectures plus complètes, explorer plus clairement des problèmes politiques et économiques, et devraient voter plus intelligemment que les jeunes ;
  • Développer de nouvelles activités de loisir et de nouveaux passe-temps ;
  • Planifier sa retraite (...) de manière à pouvoir profiter d'activités de remplacement signifiantes, une fois la retraite arrivée ;
  • Apprendre à laisser aller ses enfants (...) et établir avec eux des relations fondées sur le respect et la considération mutuelle plutôt que sur la base irrationnelle d'un parent dominant et d'un enfant dépendant.
Encore aujourd'hui, le coeur de cette théorie de l'activité (qui s'est raffinée avec le temps) réside dans l'affirmation selon laquelle la réussite du vieillissement est directement proportionnelle à la quantité des activités auxquelles le sujet continue de s'adonner. L'affirmation complémentaire est à l'effet que la baisse de la satisfaction face à la vie sera reliée à la perte des différents rôles de travailleur, de conjoint, de parent, de propriétaire,...

Les onze présupposés de la théorie

Pour bien comprendre les différents éléments définissant la théorie de l'activité, l'auteur de la « Psychologie du vieillissement » a élaboré onze propositions ou contenus qui s'enchaînent presque tous logiquement les uns aux autres.
  1. La satisfaction à vivre ressentie par un sujet donné est globalement reliée à son concept de soi. Ainsi on peut concevoir dès maintenant que plus le sujet entretient une image positive de lui-même, plus il éprouvera de plaisir à vivre.
  2.  L'image que quelqu'un se fait de lui-même dépend en bonne partie de l'image que les autres se font de lui. Ce que les autres pensent de nous continuerait à jouer un rôle significatif bien au-delà de l'enfance et de l'adolescence. c'est durant toute sa vie que le sujet aurait besoin d'être confirmé dans sa valeur par l'appréciation de ses proches.
  3. La dynamique de la personnalité demeure substantiellement la même à tous les âges de la vie. Les personnes âgées auraient donc les mêmes besoins que les plus jeunes, et réagiraient par les mêmes sentiments de frustration et de dépression lorsque ces besoins ne sont pas comblés. Il pourrait s'agir de recherche de la reconnaissance sociale, la sécurité émotive, l'expression sexuelle, la détente, ainsi que de nouvelles expériences, tout autant que le confort physique. Avec l'âge, ces mêmes besoins peuvent toutefois se présenter selon des dosages variables.
  4. Quel que soit l'âge du sujet, ce besoin d'être reconnu et apprécié se trouve essentiellement comblé lors des interactions de cet individu avec son entourage.
  5. C'est ici que s'opère la jonction entre le psychologique (l'organisation interne de l'individu) et le sociologique ( l'organisation sociale), nommément par le concept de rôle. Par définition, un rôle est l'ensemble des activités qu'un sujet donné est censé accomplir, compte tenu de la place qu'il occupe dans l'organisation sociale (parent, travailleur, secrétaire de comité, etc.). C'est en accomplissant ces différents rôles que l'individu est le plus susceptible de recevoir de son entourage l'appui et la reconnaissance dont il a besoin.
  6. Les rôles revêtent aussi une importance cruciale dans la mesure où ils servent de points d'ancrage pour l'identité du sujet. C'est en bonne partie l'ensemble de ses rôles (ce qu'il a à faire) qui permet au sujet de se faire une idée claire de ce qu'il est. Rappelons que l'identité joue un rôle central dans la santé psychologique du sujet car c'est par le tissu de ses rôles que le sujet reçoit le sentiment de son enracinement et de sa continuité.
  7. Or, en raison de l'organisation actuelle de la société, le fait de vieillir entraîne inévitablement pour l'individu la perte de multiples rôles, c'est-à-dire d'un phénomène qui survient contre la volonté du sujet. 
  8. Ce phénomène social de la perte de ses rôles par l'individu se traduira nécessairement au plan psychologique par un état de frustration, de dépression ou d'aliénation, proportionnellement à l'importance des rôles perdus. 
  9. La perte de certains rôles est inévitable. même en améliorant beaucoup l'organisation de la société, on ne pourra pas éviter qu'un conjoint meure avant l'autre, par exemple. À cause de la baisse de sa résistance physique et du déclin de ses aptitudes sensorielles ou cognitives, un travailleur qui approche du grand âge devra nécessairement un jour renoncer à son emploi.
  10. Le sujet qui s'adonne régulièrement à des activités sociales pourra faire face à la perte des rôles majeurs plus facilement qu'un sujet qui serait privé de telles activités...
  11. Les activités sociales jouent ainsi un rôle de coussin pour atténuer le choc de la perte des rôles majeurs. Elles permettent au sujet de reconstituer plus facilement son image de soi, suite à ce choc. C'est dans ce sens que la théorie soutient qu'il y a un lien entre le vieillissement réussi d'une part, et d'autre part le fait de maintenir ses rôles le plus longtemps possible et de prévoir leur remplacement éventuel par des activités sociales significatives pour le sujet.
« Activité » : un concept à préciser

Des intervenants bien intentionnés font parfois pression sur des personnes âgées pour les garder actives contre leur gré. Cette façon de faire est discutable dans la mesure où la participation forcée à des activités qui n'ont pas de sens pour un sujet donné ne peuvent pas lui être d'un grand apport psychologiques, bien au contraire.

Ceci dit, beaucoup de programmes d'activités demeurent pertinents et les intervenants qui veulent les réaliser sont justifiés de se montrer « incitatifs », surtout au début.

De même, remplir un rôle implique qu'on se soumette au contrôle et à la critique des personnes touchées par ce rôle, ou tout simplement témoins de la façon dont on le remplit. Assumer un rôle, c'est devenir responsable, et donc devenir sujet au contrôle et à la critique. Et lorsque la performance requiert de plus en plus d'énergie pour demeurer à la hauteur des standards d'autrui, c'est la tension et le stress qui se profilent à l'horizon. C'est pourquoi tant de personnes accueillent avec soulagement certaines sorties de rôles, comme par exemple prendre sa retraite.

 « Jeunes vieux » et « vieux vieux »

Cette grande diversité de la population dite « âgée » a donné lieu aux deux catégories  « jeunes vieux » pour désigner les sujet plus près de 65 ans et donc plus vigoureux, et « vieux vieux » pour désigner les sujets sensiblement plus âgés, chez lesquels les divers effets du vieillissement seront nettement plus perceptibles.

La théorie de l'activité s'applique beaucoup mieux à la majeure partie des « jeunes vieux », qui ont des chances d'être gratifiés pendant de longues années encore par des activités qui leur conviennent. Inversement, la théorie du désengagement s'applique beaucoup mieux à la majeure partie des « vieux vieux », que le vieillissement de plus en plus marqué amène à un certain retrait des activités sociales.

Différence de personnalité et satisfaction

En fait, l'enjeu du vieillissement réussi déborde largement le fait de rester actif. Une bonne façon de mesurer la réussite du vieillissement devrait tenir compte entre autres de la satisfaction du sujet à l'endroit de sa vie présente. Or, ce sentiment de satisfaction inclut plusieurs composantes :

  • L'enthousiasme versus l'apathie;
  • L'aplomb face à sa vie;
  • Le sentiment d'avoir atteint ses objectifs, quels qu'ils soient
  • Une image positive de soi.
Le choix des activités est fortement relié aux différentes personnalités des personnes âgées ; ce qui compte le plus, c'est la qualité des activités plutôt que la quantité. On se retrouve alors très proche du concept de « désengagement sélectif », point qui est central dans la théorie du désengagement.

RD  

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