Vivre la vie d'un Senior

samedi 4 avril 2015

L'amour n'a pas d'âge parce qu'il évolue avec le temps


amour sénior

Article de Yvon Dallaire, psychologue, Journal de Québec, 22 février 2015


L'amour n'a pas d'âge, mais évolue avec l'âge. Nous espérons tous que l'amour rimera avec toujours, surtout au début de la vie amoureuse. Le taux élevé de divorce nous met pourtant devant la dure réalité du couple : un creuset pour provoquer des crises et des conflits pour la plupart insolubles.

Il y a pourtant des couples qui durent, qui apprennent à surmonter les crises et à gérer les problèmes insolubles.

La psychologue finlandaise Kaarina Määttä a interrogé des centaines de couples et a découvert quatre bonnes raisons d'être en couple et sept tremplins des couples heureux à long terme.

QUATRE BONNES RAISONS 

  1. Une relation conjugale heureuse constitue une véritable assurance maladie. Les gens heureux en couple vivent aussi plus longtemps et sont moins stressés.
  2. Les parents heureux font des enfants heureux. Ces enfants se développent mieux, réussissent mieux à l'école et ont un sentiment de sécurité et de plus grande confiance.
  3. Une intimité heureuse facilite l'adaptation à une société de concurrence et de performance. Un couple heureux travaille mieux et réussit mieux que les autres.
  4. Les couples heureux à long terme évitent les affres du divorce. On ne meurt pas d'un divorce mais on en reste marqué pour la vie, même si c'est parfois la seule et unique solution.

LES SEPT TREMPLINS 

L'acceptation des différences et du changement. On voudrait bien que notre partenaire soit exactement comme on le voudrait, mais c'est une illusion. Pour vivre en couple, il faut beaucoup de flexibilité pour accepter des compromis et pour apprendre à négocier. S'affirmer et rester ouvert à l'autre.

Les plaisirs quotidiens. On ne peut éviter la routine, mais on peut inventer des routines agréables et en changer lorsqu'elles deviennent ennuyantes. Sans routine quotidienne, pas de fêtes qui nous sortent de la routine.

Les déclations d'amour et l'aptitude à rendre heureux. Les mots « Tu es merveilleux (se) », « Merci ! » ou « Je t'aime », dits avec admiration et gratitude, nous rendent et rendent l'autre joyeux et enthousiaste. Ce sont des paroles « Sésame, ouvre-toi ! ».

L'engagement conscient envers le partenaire. L'amour est une décision consciente basée sur la connaissance de l'autre. Les couples heureux nourrissent des projets à court, moyen et long terme. Ils ont des plaisirs quotidiens, mais ils se concentrent aussi sur un avenir commun.

L'estime de soi. Le meilleur chemin vers l'autre est celui qui commence vers soi. Il est plus facile d'accepter les faiblesses et les erreurs de son partenaire lorsque l'on se considère soi-même comme une personne erratique et perfectible. Cela renforce notre maîtrise de soi et de sa relation.

L'allégement des vicissitudes. Le couple n'est pas un long fleuve tranquille : il passe par des hauts et des bas. Les fardeaux conjugaux sont beaucoup plus faciles à supporter lorsqu'on les partage à deux. C'est pourquoi il faut parfois arrondir les angles et garder en tout temps un espoir d'une vie meilleure une fois que...

L'acceptation et le règlement des désaccords. Impossible de ne pas se disputer lorsque l'on vit à deux. Impossible d'être d'accord en tout temps et sur tout. Il faut apprendre et accepter que des conflits soient parfois (et même souvent) insolubles. Ce sera d'autant plus facile que les paroles aimantes et les moments de plaisir supplanteront les paroles désobligeantes et les moments difficiles. Les couples heureux ont appris à s'excuser mutuellement et à pardonner.

Oui, l'amour se fiche de l'âge et ne compte pas les rides lorsque tous ces ingrédients sont présents. De passion romantique à 20 ans, l'amour se tranforme en intimité, en attachement, en reconnaissance et en compagnonnage, au fur et à mesure qu'il transcende les difficultés de la vie à deux.

L'amour, c'est l'objectif du couple.

RD

Vieillir en douceur, tout un honneur

Article de Maxim Martin, Journal de Québec, 4 avril 2015



Pourtant,Victor Hugo a vécu très, très vieux, dans toute sa gloire !


Comment ça se fait qu'on délaisse nos aînés ? Quand est-ce que le placer est devenu la norme voire même un réflexe ? On entend souvent la phrase: «On a placé grand popa pour son bien», mais disons la vérité, c'est pour notre propre bien à nous.

Pendant des siècles et des siècles, les aînés étaient les piliers de la famille voire même de la société. On puisait dans leur sagesse, c'est eux qui gardaient l'histoire d'un peuple en vie. Ils nous inculquaient traditions et coutumes ainsi que les grandes égarements qui nous attendaient, basées sur les erreurs de leur propre vécu. Toujours avec raison? Bien sûr que non, mais au moins on avait une base.

Alors, quand est-ce que ça s'est perdu tout ça ?

CONFESSION

Alors quand est-ce qu'on a décidé qu'on avait plus besoin d'avoir accès à toute cette expérience de vie? À une certaine époque, quand une histoire commençait par la phrase classique: «Dans mon temps...», je suis convaincu qu'elle attirait l'attention de tous ceux qui étaient réunis autour du conteur... Aujourd'hui, on voit ça comme le radotage du p'tit vieux assis sur un banc de parc.

Quand même assez ironique puisque tôt ou tard, on finit tous par la prononcer, cette phrase-là!

 Je vais y aller avec une confession personnelle.

Quand je me retrouve entouré de vieilles personnes, ça me confronte à ma propre mortalité. Je vis dans un déni total et refuse presque de faire face à ce qui m'attend un jour.

J'essaye de chasser les images de mes capacités qui s'affaiblissent, de ma démarche qui ralentit. Je stress sur les maladies qui m'attendent, les mauvaises nouvelles que le médecin va m'annoncer, mais surtout, les activités de mon quotidien auxquelles je vais être obligé de renoncer, car je ne serais tout simplement plus capable de les faire.

Comme plusieurs, je suis un hypocrite!

Je suis carrément outré par les histoires d'abus sur les vieux, de négligence par rapport à leurs soins et, le plus triste de tout, l'abandon total des ces vétérans de la vie, qui ne deviennent qu'une simple présence sur un portrait de famille. Mais pendant que je me console à me dire que j'ai le cœur à la bonne place en soulevant tout ça... j'essaye de me souvenir c'est quand la dernière fois que j'ai appelé ma grand-mère pour prendre de ses nouvelles?

Où sont les mercis pour les poudings chômeur réconfortants, l'argent toujours glissé à l'intérieur d'une carte d'anniversaire et les cornets de crème glacée dont il ne fallait pas parler à maman et papa?

UNE RENCONTRE

Hier, en profitant de la belle journée, j'ai croisé un monsieur de 80 ans qui s'est mis à me parler et, je vous jure, j'ai rarement ri comme ça. Voici quelques-unes des perles qu'il m'a lancées :

« Y a quelqu'un qui a déjà dit que les vieux pensaient moins à la mort. Faut-tu être assez épais pour dire ça ! Voyons donc... quand t'as besoin d'aide pour prendre ton bain et que tu portes une couche... tu te doutes ben qu'il t'en reste plus pour longtemps. »

« Le cancer... Bonne chance, le grand ! Si tu peux trouver des organes qui ne sont pas déjà amochés, amuse-toi avec ce qu'il te reste. »

« Une chose qui est plate quand t'es vieux, c'est la lenteur. Tout le monde te dépasse, tout est plus rapide que toi. T'apprécies les journées venteuses juste pour avoir le plaisir de marcher plus vite »

Quelle rencontre formidable !

Je suis reparti en me disant que malgré les bobos et les douleurs, malgré la tristesse de voir tes capacités s'affaiblir, si tu es capable de garder ton sens de l'humour jusqu'à la fin de tes jours, c'est déjà ça de gagner. Du coup, j'ai déjà un peu moins peur de vieillir !

On est plein de contradiction, car on rechigne à l'idée d'être vieux un jour, mais lorsqu'on croise quelqu'un qui a 90 ans, on se souhaite tous de se rendre jusque-là.

RD

dimanche 29 mars 2015

Le dogmatisme religieux rend difficile le « vivre ensemble »

Article de Robert Joumard et de Mouloud Haddak, février 2015

« Il faut combattre le racisme, les inégalités sociales et le dogmatisme religieux »

Un boulanger d’origine tunisienne reçoit des menaces et la vitrine de son magasin est détruite ; un jeune d’allure maghrébine se fait insulter dans la rue ; une jeune beurette se fait traiter de pute. Bien que ce soit des agressions contre des personnes de culture arabo-musulmane, ce ne sont pas des agressions « islamophobes » car les agresseurs sont eux-mêmes de culture arabo-musulmane. Mais ces agresseurs n’admettent pas que des immigrés maghrébins ne respectent pas l’interdiction de vendre du jambon ou de l’alcool, ils veulent interdire à tout citoyen dont les grands parents ont émigré d’Algérie de manger pendant le ramadan et veulent imposer le code vestimentaire actuel d’une partie des musulmans pratiquants à toute fille de culture arabo-berbéro-musulmane, comme nous en avons été témoins.

En parallèle, ces pratiquants musulmans qui s’affichent sont victimes d’attitudes hostiles de la part d’une partie de la population et peuvent alors vivre dans la crainte. Ils se plaignent d’être constamment suspectés d’infractions, voire de terrorisme, d’être constamment sous le regard insistant et inquisiteur des passants, ce qui les amènent parfois à avoir les nerfs à fleur de peau. Mais plutôt que de réagir intelligemment en se comportant en citoyens républicains et laïques, et en démontrant l’inanité de ces accusations, ils donnent raison à leurs adversaires, ils renforcent les signes extérieurs de religiosité en portant la robe blanche et la barbe ou le voile noir, très présents dans les quartiers populaires, en demandant des lieux de prière sur leurs lieux de travail, en trouvant inadmissible d’être dirigés par une femme, etc.

Tous ces phénomènes qui exacerbent les différences et provoquent le rejet sont nouveaux car ils n’existaient pratiquement pas il y a vingt ans. Ces codes vestimentaires n’appartiennent en rien à la culture de leurs parents ou grands parents, mais ont été importés du Moyen Orient. Qui a poussé ces jeunes croyants à se vêtir ainsi ? Qui les pousse à l’intolérance vis-à-vis de leur propre groupe social ? Difficile à savoir, mais il est clair que certains font monter la pression pour que ces jeunes ne s’intègrent pas et s’isolent, en miroir de l’exacerbation des peurs par le Front national et de sa volonté d’opposer les Français « jambon-beurre » aux autres. Tout cela est évidemment favorisé par l’explosion du nombre de chômeurs, la disparition des services publics, les conflits au Moyen Orient et en Afrique. Mais ces facteurs bien réels de l’éclatement du vivre-ensemble n’effacent pas le rôle spécifique du dogmatisme religieux.

L’intolérance vis-à-vis des autres et la mise en avant de ce qui sépare sont des caractéristiques fréquentes de toutes les religions, qui peuvent aller jusqu’à la guerre. Qu’on se rappelle les milliers de protestants assassinés par des catholiques en France lors du massacre de la Saint-Barthélemy, les massacres de musulmans par les hindouistes ultra-nationalistes en Inde, les meurtres d’Arabes par des religieux juifs en Israël dont s’est vanté par exemple le chef du Foyer juif, un parti de la droite sioniste religieuse israélienne (« J’ai tué beaucoup d’Arabes dans ma vie. Et il n’y a aucun problème avec ça »), plus récemment les massacres de Boko Haram au Nigéria. Sur un mode plus « doux », qu’on se rappelle le combat des fondamentalistes chrétiens aux États-Unis pour interdire aux femmes de disposer de leur corps, la Manif pour tous voulant interdire aux homosexuels de vivre comme tout le monde...

Face à eux, les progressistes ont de tout temps combattu l’obscurantisme, l’intolérance, le dogmatisme et le fanatisme religieux. Ce fut en France les luttes anticléricales qui ont permis la laïcité et la loi de séparation de l’Église et de l’État, la lutte des protestants pour simplement avoir le droit de l’être. C’est aujourd’hui la lutte des laïcs en Turquie, en Algérie ou en Israël pour exister face aux religieux, les luttes contre les hindouistes nationalistes qui cherchent à éradiquer ceux qui ne le sont pas, c’est le Palestinien Waleed al-Husseini emprisonné par l’Autorité palestinienne pour sa libre-pensée, ou le blogueur saoudien Raif Badawi, libre-penseur, condamné à mille coups de fouet et dix ans de prison.

L’actualité de cette lutte explique le soutien inconditionnel à Charlie Hebdo d’Özgür Mumcu, éditorialiste du grand quotidien turc Cümhüriyet et fils d’un très célèbre journaliste d’investigation qui trouva la mort dans un attentat en 1993 : « Nous ne pourrions imaginer une plus grande insulte faite à l’islam ainsi qu’à son Prophète. […] Désormais, tout le monde, et en particulier ceux qui placent l’islam au cœur de leur vie, doivent réfléchir sur les vrais auteurs de l’insulte à l’islam et à son Prophète en dépassant leur appris par cœur. » Mais face à lui, des journaux islamo-conservateurs tel Yeni Akit refusent de condamner les assassinats.


La religion peut être en effet un outil extraordinairement efficace d’asservissement des peuples, pour leur dénier le droit de choisir leur avenir. Ce n’est pas le seul outil d’asservissement, mais sa force particulière et spécifique provient du caractère surnaturel – révélé – de sa parole qui ne peut donc être discutée. Cet argument qui permet d’imposer aux autres sa loi, par la force si nécessaire, est un argument d’autant plus facile que les textes sacrés disent tout et son contraire : dans la Bible, il y a à la fois amour et violence, et dans le Coran on trouve des versets prônant la violence et d’autres la tolérance.  Il suffit de choisir ses citations. Cette vision dogmatique est celle des courants les plus obscurantistes, ceux qui ont le vent en poupe aujourd’hui, dans une bonne partie du monde, y compris aux États-Unis d’Amérique.

À l’inverse, de nombreux chrétiens et musulmans, entre autres croyants, ont justifié le rationalisme contre la tradition ou les vérités imposées. Ainsi Ibn Rochd (Averroès) prônait dès le 12esiècle la suprématie de la raison sur la foi, ce qui en fit un précurseur du rationalisme. Bien plus tard, le théologien protestant Alexandre Vinet (1797-1847) se montrait un ardent défenseur, non seulement du « droit d’adopter aucune religion » (en un temps où cela n’avait rien d’évident), mais du « droit de manifester son incrédulité » : les « voix ennemies » de la religion doivent pouvoir s’exprimer « aussi librement qu’elle car il n’y a pas de vraie foi sans conviction ni de conviction sans examen ». Pour lui, la recherche authentique de la vérité présuppose l’absence totale de contrainte. À la fin du 19e siècle, l’Égyptien Mohammed Abdou, à la suite d’autres penseurs cairotes un siècle plus tôt, affirmait que dans la question de la loi, quand la raison prime sur la tradition, il faut suivre la raison. Il y a quelques semaines, vingt trois intellectuels musulmans ont signé dans le New York Times un appel vibrant à une réforme de l’islam, pour que la démocratie vienne avant la religion comme principe organisateur de la société.

La religion musulmane, dominée actuellement par les courants les plus rétrogrades, n’a pas toujours été que cela. En Europe, nous devrions nous rappeler l’époque de l’Inquisition, où les principautés andalouses étaient à la pointe du progrès scientifique, culturel et artistique, alors que les évêques inquisiteurs et leurs homologues musulmans égyptiens ordonnaient de brûler sur la place publique les livres critiques vis-à-vis des dogmes religieux, comme ceux d’Ibn Rochd. Des poètes comme les Persans Abû Nuwâs ou Omar Khayyām ont chanté le vin, l’homosexualité… Des penseurs athées comme le Syrien Aboulala el-Maʿarri se sont exprimés sans crainte… Ibn Sīnā (Avicenne) est considéré depuis le 11e siècle comme le père de la médecine moderne dont le Canon de la médecine est resté un manuel de référence en Europe pendant des siècles…

En France, nous avons quelque peu oublié la religion opium du peuple de Kant, Herder, Feuerbach et Marx. Nous avons oublié notre héritage anticlérical des 18 et 19e siècles, la religion dominante ayant finalement accepté la liberté et ne dominant plus grand chose. Mais d’autres phénomènes religieux apparaissent, dont certains sont dangereux pour la liberté, l’égalité et la fraternité : nous sommes démunis pour en comprendre les ressorts au-delà de la crise sociale et encore plus démunis pour les combattre. Il est temps de revivifier le combat laïc et rationaliste.

Il est d’autant plus temps que nous sommes confrontés à plusieurs religions ou sectes face auxquelles les outils ou le cadre créé par la loi de 1905 ne sont plus tout à fait adaptés ou méritent une revalidation.

La question juive, malgré la sécularisation de la religion et les accords avec l’État français, continue à poser problème du fait de la confusion entre groupe religieux et groupe ethnique d’une part, et d’autre part de l’interférence d’un État étranger, Israël, dans l’organisation et la mobilisation des principales associations juives, dont le Crif est un bon exemple. Il est difficile de railler la religion juive ou de critiquer la politique de l’État d’Israël sans se faire taxer d’antisémite. La frilosité, voire la crispation, des différents gouvernements français est révélatrice du manque de clarté des pouvoirs en place sur cette question. Les citoyens ont le droit de critiquer la religion juive, de condamner la politique israélienne à l’égard du peuple palestinien, ils ont le droit de condamner la politique de soutien du gouvernement français à l’État annexionniste israélien.

En parallèle, la religion musulmane a été longtemps maintenue dans une sorte de non droit avec l’islam des caves, le refus des municipalités d’accorder des permis de construire des mosquées dignes de ce nom, l’absence ou l’insuffisance des carrés musulmans dans la plupart des cimetières en France, les difficultés à ouvrir des écoles musulmanes. Tout cela a contribué à maintenir cette religion dans un statut conflictuel.

Les musulmans intégristes auraient tort de se gêner d’exploiter ces brimades à leur profit. Ils tentent ainsi d’embrigader les laïques de culture arabo-musulmane dans une guerre de religion avec comme étendards des symboles qui ne font pas partie des cinq piliers de l’islam, mais qui sont tous issus d’une interprétation plutôt traditionnaliste et littérale des textes religieux : le port du voile islamique, voire du niqab, les menus hallal, les fêtes religieuses, etc. D’ailleurs, même les textes islamiques prévoient des dérogations quant à l’application des cinq piliers de l’islam. Par exemple, un musulman est dispensé de jeûner en cas de voyage ; les femmes ne sont pas autorisées à jeûner en période de règles ou de grossesse ; les enfants, les malades et les personnes âgées ne sont pas non plus autorisés à jeûner.

Ces crispations sont d’autant plus fortes que la classe politique française, dans son ensemble, est peu à l’aise à l’égard de cette religion.

La confusion entre Français musulmans et Français originaires du Maghreb, du Proche ou du Moyen Orient, voire même d’Afrique, est fréquente. En témoignent les différentes gaffes de l’ancien président de la République à propos des attentats commis par M. Merah à Toulouse et à Montauban, quand il qualifie par exemple l’une des victimes, soldat français d’origine maghrébine certes, mais catholique, de « Français d’apparence musulmane ».

La classe politique et les médias français ont une culture très superficielle à la fois des civilisations et cultures arabo-musulmanes et de la diversité des traditions qui en sont issues : il n’y a rien de comparable entre la tradition et la pratique religieuse musulmanes des Maghrébins et celles des Moyens Orientaux du Golfe… Ce qui explique le raidissement des milieux politiques et intellectuels à l’égard de cette religion et de ses expressions.

Ce raidissement est adroitement exploité par les mouvements d’extrême-droite français qui exploitent la peur et l’ignorance des Français quant à cette religion pour en faire un épouvantail contre l’immigration d’origine maghrébine ou africaine.

D’un côté, ce racisme et cette discrimination manifestes à l’égard de la population d’origine maghrébine ou africaine s’expriment maintenant via la religion : il y a trente ans, les immigrés du Maghreb étaient qualifiés de nord-africains ou de maghrébins ; aujourd’hui on les appelle musulmans et la lutte contre l’islamisme est devenue un prétexte.

De l’autre côté, sous la pression des mouvements dit de lutte contre cette « islamophobie », émerge un mouvement intellectuel français sympathisant de ces islamistes dits modérés qui prône une attitude plutôt conciliatrice à l’égard du voile islamique et d’autres manifestations de l’islamisme en France. Ce mouvement intellectuel joue le jeu de ces islamistes qui se disent modérés, éclairés ou démocrates, mais qui n’ont d’autre objectif que d’imposer de fait leur vision et leur conception rétrogrades de la place de l’islam en France et de conforter leur mainmise sur la « communauté musulmane ».

Le gouvernement français, par la voix de son premier ministre, vient, semble-t-il, de commencer à prendre conscience de l’ampleur du fossé qui sépare les populations de France en parlant d’apartheid territorial, social et ethnique. Cependant, il ne suffit pas de reconnaitre cet apartheid de fait, encore faut-il se donner les moyens de le combattre ! Persister dans la politique d’austérité et de restrictions budgétaires relève de l’insouciance. Même les outils de politique publique dont s’était doté l’État pour lutter contre ces ghettos se sont étiolés comme la loi SRU ou la carte scolaire. Ces attentats et la prise de conscience à laquelle ils ont conduit devraient déboucher sur un vrai programme de lutte, réaliste, échelonné dans le temps et évalué périodiquement.

La République ne peut plus faire l’économie d’un vrai débat national sur la laïcité car les conditions ayant présidé à la loi de 1905 ne sont plus tout à fait les mêmes, comme on l’a vu plus haut. Le dogmatisme religieux communautarise le débat politique et sape le vivre-ensemble. On ne peut lutter contre toute manifestation raciste ou xénophobe à l’égard de tel ou tel groupe ethnique sans combattre aussi le dogmatisme religieux et sans se priver du droit légitime de critiquer toute religion, toute idée, tout dogme, quels qu’ils soient, quitte à « heurter, choquer ou inquiéter une fraction quelconque de la population », selon le droit reconnu par la Cour européenne des droits de l’homme .

Le combat pour l’émancipation est un combat contre les inégalités sociales, contre le dogmatisme, contre ceux qui veulent imposer par la force leurs conceptions, qu’ils se prétendent inspirés par un dieu ou par un homme.

Source de l'info : Le blog de Robert Joumard


RD

La démence : l’OMS se mobilise


Démence sénile
 
Le 16 et 17 mars 2015, L’OMS (Organisation mondiale de la Santé) a organisé la première conférence ministérielle sur l’action mondiale contre la démence. Réunissant de nombreux pays, l’OMS a reçu le soutien de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et du ministère de la Santé du Royaume-Uni.

L’État des lieux

La démence touche plus de 47 millions de personnes dans le monde et avec le vieillissement des populations, ce chiffre devrait tripler dés 2050. Longtemps considérée comme une maladie taboue, la démence est aujourd’hui devenue un véritable problème de santé publique. En 2012, l’organisation Mondiale de la Santé avait déjà publié un rapport « La démence: une priorité de santé publique », visant à sensibiliser les acteurs politiques.

L’Organisation Mondiale de la Santé a donc appelé, à travers cette première conférence, les pays à mettre en place des fonds de recherche destinés à accélérer les dispositifs de soins et de soutien.

Qu’est-ce que la démence ?

Elle n’est pas une maladie en soi mais elle qualifie un large panel de symptômes. Souvent appelée « sénilité » on l’associe facilement au vieillissement, or la démence n’est pas une conséquence  normale de la vieillesse. Même si les personnes âgées sont les plus touchées, Il existe plusieurs types de maladies liées à la démence. Les principales sont :
On parle de démence lorsqu’au moins deux des fonctions mentales suivantes sont touchées :
  • La mémoire,
  • Le langage,
  • Raisonnement,

Un enjeu mondial

La population mondiale va vivre de plus en plus vieille, c’est pourquoi tous les pays sont concernés et doivent s’impliquer dés maintenant dans la recherche.

« Il faut investir davantage dans la recherche pour mettre au point un traitement, mais aussi pour améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de démence et le soutien apporté aux familles et aux personnes qui leur prodiguent des soins. » déclare le Dr Margaret Chan, Directeur général de l’OMS.

Le Royaume-Uni et l’Irlande du nord

Lors de la conférence, le Royaume-Uni et l’Irlande du nord ont décidé d’allouer plus de 100 millions de dollars à la recherche. Une initiative qui devrait faire des émules et inciter les autres pays à investir dans les fonds de recherche.

L’encadrement des malades et des familles

Aujourd’hui, les professionnels souhaitent non seulement faire avancer la recherche sur la maladie mais également apporter un réel soutien aux patients et aux familles. C’est pourquoi il a été décidé la mise en place d’un observatoire mondial de la démence afin de suivre les actions économiques et politiques des différents pays.

La France est aussi concernée

La France fait partie des pays investis dans la lutte contre les maladies dégénératives et notamment la démence. En effet, on estime qu’actuellement plus de 850 000 personnes de plus de 65 ans sont atteintes de démence en France (rapport OPEPS), avec quasiment trois fois plus de femmes que d’hommes chez ces patients, les plus de 90 ans représentant 230 000 cas.

À noter : 19 pays ont d’ores et déjà mis en place des actions de lutte contre la démence :
  • Australie,
  • Belgique,
  • Costa Rica,
  • Cuba,
  • Danemark,
  • États-Unis d’Amérique,
  • Finlande,
  • France,
  • Irlande,
  • Israël,
  • Italie,
  • Japon,
  • Luxembourg,
  • Mexique,
  • Norvège,
  • Pays-Bas,
  • République de Corée,
  • Royaume-Uni de Grande-Bretagne,
  • L’Irlande du Nord.
Source de l'info : http://enjeux-senior.org/author/seniorvie/

RD

jeudi 26 mars 2015

Testez votre audition avant de consulter un audioprothésiste


 ENTENDEZ-VOUS BIEN ? ? ?



Vous avez l'impression que votre audition n'est plus aussi bonne qu'avant, mais vous hésitez à consulter un spécialiste ? Voici quelques points qui ne trompent habituellement jamais. N'hésitez pas à répondre à ces questions avec l'aide d'un proche qui pourra apporter quelques remarques sur votre capacité auditive.

  • Lorsque vous regardez la télévision avec d'autres personnes, augmentez-vous régulièrement le volume?
  • Faites-vous souvent répéter les gens qui s'adressent à vous ?
  • Avez-vous de la difficulté à comprendre quand vous ne voyez pas le visage de la personne qui parle ?
  • Avez-vous l'impression que les gens marmonnent ou ne parlent pas clairement ?
  • Avez-vous souvent du mal à tenir une conversation s'il y a du bruit autour de vous ou quand d'autres personnes parlent en même temps ?
  • Vos proches vous ont-ils déjà demandé si vous avez un problème auditif ?
  • Trouvez-vous que les gens parlent trop vite ?
  • Évitez-vous  de participer à des événements parce que vous n'entendez pas ce qui est dit quand il y a trop de bruit ?
  • Avez-vous de la difficulté à entendre couler l'eau du robinet ou du bain quand vous êtes dans une autre pièce ?
  • Lors de conversations en voiture, au restaurant ou dans tout autre endroit bruyant, avez-vous de la difficulté à saisir exactement ce qui est dit ?
  • Vous sentez-vous fatigué quand vous devez parler ou écouter durant une longue période ?
  • Lors de rassemblements, cherchez-vous à vous asseoir près de personnes qui perlent pour pouvoir saisir leur propos ?
  • Trouvez-vous souvent qu'il est difficile de savoir d'où viennent les sons ?

Si vous répondez affirmativement à quelques-unes de ces questions, téléphonez dès maintenant pour prendre rendez-vous avec votre médecin qui vous donnera une ordonnance pour avoir accès à un audioprothésiste.

Ce dernier est en mesure d'établir un diagnostic précis et de vous conseiller au mieux sur les solutions qui s'offrent à vous pour améliorer votre qualité de vie, en tenant compte de vos besoins, de notre niveau de perte auditive, de vos goûts et de votre budget. En effet, les technologies évoluent sans cesse dans le domaine des prothèses auditives et les résultats obtenus sont de plus en plus performants.

Tout d'abord, la technologie numérique s'applique à tous les modèles de prothèses auditives, s'adaptant automatiquement aux environnements changeants, modifiant le volume, réduisant les bruits de fond dérangeants ou en utilisant un système sophistiqué qui permet à l'utilisateur de se concentrer sur les paroles de la personne qui se trouve devant lui. Plusiers modèles sont même compatibles avec les téléphones conventionnels, permettant une adaptation confortable et en douceur.

La technologie Bluetooth « mains libres » a également transformé le domaine des prothèses auditives. L'appareil  peut maintenant capter les signaux de votre téléviseur, de votre chaîne audio ou de votre téléphone et les retransmettre directement dans vos oreilles. Finies les interférences entre le téléphone mobile et la prothèse !

RD

Six conseils pour aider les personnes âgées à mieux dormir

Article Le Soleil, 22 mars 2015



Si vous ne dormez plus comme un bébé, vous n'êtes pas le seul. Avec l'âge, le cerveau se modifie, et ces changements nuisent à la qualité du sommeil. De nombreux changements sont tout à fait normaux, mais les scientifiques pensent que si les personnes âgées dormaient mieux, certaines fonctions cérébrales pourraient s'améliorer, comme la concentration et la mémoire.

« Le sommeil change avec l'âge », explique la Dre Julie Carrier, scientifique au Centre d'études avancées en médecine du sommeil de Montréal. De nombreuses personnes âgées se couchent plus tôt et ont un réveil matinal plus précoce, font plus de siestes et dorment moins la nuit. Elles ont aussi un sommeil plus léger et plus fragmenté par des éveils.

« On a tous vu un bébé dormir comme un ange alors que la maison est pleine d'invités à l'occasion d'une réception de Noël, ajoute-telle. Mais à partir de 50 ans, ce n'est tout simplement plus possible de dormir aussi bien et aussi profondément qu'un bébé. »

Pendant notre sommeil, le cerveau en profite pour recharger ses batteries. Mais petit à petit, le cerveau perd de cette capacité, ce qui affecte négativement notre habileté à apprendre et à se souvenir. 

La Dre Carrier et ses collègues cherchent des moyens de stimuler le cerveau pour redonner aux personnes âgées la qualité de sommeil qu'elles ont perdue. « Certaines personnes pensent qu'on cherche à trouver la fontaine de jouvence », s'amuse-t-elle. Il faut dire que sa recherche en est encore à ses débuts. D'ici à ce qu'elle obtienne des résultats, si vous en avez assez de compter des moutons, essayez ces six trucs pour mieux dormir :

1. Réduisez votre consommation de tabac, de café et d'alcool.

2. Soyez actif et mangez bien, mais ne mangez pas trop et ne faites pas trop d'exercice trop près de l'heure du coucher.

3. Créez un environnement optimal pour dormir, notamment une chambre calme et sombre et une température ambiante confortable.

4. Allez au lit à la même heure tous les soirs.

5. Diminuez autant que possible les expériences stressantes à l'heure du coucher.

6. Ne paniquez pas. Les modifications du sommeil liées à l'âge sont normales. Cependant, si vous ne dormez pas bien, discutez-en avec votre médecin. Il se peut que votre insomnie soit liée à des problèmes médicaux.

Le Centre d'études avancées en médecine du sommeil est situé dans les locaux de l'Université de Montréal. On y compte plusieurs laboratoires où les chercheurs disposent d'une technologie de pointe pour étudier les divers aspects du sommeil, notamment la façon dont les douleurs chroniques nuisent au sommeil, les causes du somnambulisme, les changements de structure du sommeil après un traumatisme crânien et la sensibilité du cerveau à la lumière.

Les travaux de recherche de la Dre Carrier sont financés en partie par les Instituts de recherche en santé du Canada. Pour obtenir les derniers résultats de ses travaux, rendez-vous à www.ceams-carsm.ca.

RD

dimanche 15 mars 2015

Un barbier du Québec tout à fait spécial

Article de Mylène Moisan, Le Soleil, 13 mars 2015

Le barbier Jean-Guy O'Malley, qui fêtera son 80e anniversaire le 5 avril, prendra sa retraite le 15 juin après 64 ans de métier.


 Photo Le Soleil, Yan Doublet
  
Le barbier Jean-Guy O'Malley, qui fêtera son 80e... (PHOTO LE SOLEIL, YAN DOUBLET)

(Québec) Jean-Guy O'Malley avait quatre ans quand sa mère est morte, elle avait 35 ans. «On était huit enfants, on a tous été placés.» Jean-Guy s'est retrouvé dans un orphelinat chez les religieuses, puis dans «une maison de psychiatres».Il est un orphelin de Duplessis.

 Dans ces temps-là qui ne sont pas si lointains, les communautés touchaient une «prime double» quand elles plaçaient un enfant en institution. «J'ai été enfermé de 4 ans à 15 ans.» Quand il est sorti, il ne savait ni lire ni écrire, il s'est ramassé à Québec, a croisé un bon Samaritain qui lui a enseigné les rudiments de la vie en société, quelques règles de grammaire et de calcul.

Ce n'était pas n'importe quel quidam, c'était le maire de Sainte-Foy en personne, qui avait instauré des «cours pour les illettrés». Noël Carter a aussi donné le feu vert à Place Laurier. Il a coupé le ruban en 1961.

À 15 ans, Jean-Guy a été embauché par un cultivateur. «Je travaillais aux champs pour cinquante cennes par jour, sept jours par semaine, du petit jour jusqu'au soir. Si je manquais un matin, c'était vingt-cinq cennes en moins.» Il était une bête de somme.

 Puis, il a eu une idée. «C'est arrivé comme ça, en plein après-midi, je me suis dit que je pourrais devenir barbier. Je suis retourné voir les soeurs de l'orphelinat, je leur ai demandé de me le montrer, une des soeurs est descendue avec un clipper... J'ai fait les cheveux des gars pendant six mois, les filles pendant un autre six mois.» Il apprendra beaucoup plus tard que son père était barbier.

 À 17 ans, il s'est dit qu'il voulait en faire son métier. Il s'est présenté, sans s'annoncer, à l'Institut Saint-Jean-Bosco, qui accueillait les garçons dont personne ne voulait. Il se rappelle l'escalier, le bureau vitré, le frère Maurice qui était dans le bureau.

- Qu'est-ce que tu veux?
- De l'ouvrage.
- Qu'est-ce que tu sais faire?
- Les cheveux.

Jean-Guy a été embauché, 20 $ par semaine, logé, nourri, «mais pas juste pour faire les cheveux. Je faisais le service des frères aux tables, je faisais le ménage de la chapelle, c'était grand comme une église...»

On parle beaucoup de la DPJ, mais on oublie l'époque de ces refuges où échouaient des dizaines d'enfants. En 1951, il y avait presque 400 garçons à Saint-Jean-Bosco, de ceux-là 250 orphelins, 26 enfants abandonnés par leurs parents adoptifs, 17 par leurs parents biologiques, 19 illégitimes.

Jean-Guy était ambitieux, il voulait travailler dans un vrai salon. Il n'avait pas sa neuvième année, il fallait avoir sa neuvième année pour devenir un vrai coiffeur. C'est là que Noël Carter est revenu dans l'histoire, il a demandé à Gabriel Gosselin, le «président de la coiffure du Québec», de faire une exception. Il a refusé.

 Jean-Guy a insisté, le patron des coiffeurs s'est ravisé. «Il m'a dit : "Je vais te donner l'adresse de l'école", c'était sur la rue Langelier. On était en février. Il m'a dit : "Tu vas y aller là, et on va te faire passer un test. Si tu as 65 %, tu es accepté." J'ai eu 85 %! J'avais le droit de pratiquer, mais pas dans la zone 1a-Québec. Pas au centre-ville.» À l'époque, n'était pas coiffeur qui voulait, où il voulait.

 Qu'à cela ne tienne, Jean-Guy s'est poussé au nord de la ville, il est allé «faire des cheveux» au village huron pendant quelques années, il a même habité «trois ou quatre ans» chez les parents de Max Gros-Louis. Il a rencontré sa femme à Loretteville, ils ont eu quatre enfants, ont été mariés pendant 42 ans.

Il a travaillé à Shannon, eu un salon à Neufchâtel. «Je l'ai vendu quand un de mes fils s'est noyé, il avait huit ans et neuf mois.»

En 1988, il s'est installé où il est encore aujourd'hui, à l'angle de l'avenue Chauveau et du boulevard de l'Ormière. Ça aurait l'air d'un bungalow comme les autres autour si ce n'était du poteau de barbier devant. Je devrais dire plutôt un bungalow comme l'autre, il en reste seulement deux à cette intersection, des complexes commerciaux ont remplacé les maisons des voisins.

Il y a un Petro-Canada en face, un gros Uniprix en biais.

C'est un des nombreux clients de Jean-Guy qui m'a écrit pour me parler de lui, pour me suggérer d'aller faire un tour. Je suis passée mardi, un client était sur son départ, Jean-Guy était sur sa chaise de barbier. On a jasé pendant une heure. Il m'a raconté comment il a retrouvé ses frères et soeurs, comment il a fait son chemin. Il m'a raconté un Québec que je n'ai pas connu.

 Un homme est entré. Un client fidèle depuis le temps où Jean-Guy travaillait à Shannon, le monsieur y habite encore, il a fait le voyage exprès. Les cheveux bien mis, je soupçonne qu'il avait plus besoin de jaser que de se faire coiffer. Je les ai laissés entre hommes.

Il y a un mois, un agent immobilier est passé. «Il m'a dit qu'il avait un acheteur. Ils vont faire des bureaux.» Jean-Guy fêtera ses 80 ans le 5 avril, fermera boutique le 15 juin après 64 ans de métier. Il travaillera jusqu'à la fin cinq jours semaine, du mardi au samedi. «Je n'ai jamais pris de vacances. La réussite, ce n'est pas pour les paresseux. C'est à mon tour, maintenant, de faire comme tout le monde et de profiter un peu de la vie.»

 Ainsi se tournera une page d'histoires. Le pluriel n'est pas anodin.

RD

P.S. Et il fait toujours les cheveux comme un PRO, avec une adresse rare... J'en sais quelque chose puisque je vais, moi aussi, perdre mon barbier préféré au printemps qui s'en vient.